Pluie de bulles à Angoulême

Publié le 1 février 2016 à 17:21 Mis à jour le 30 décembre 2022 à 10:32
Festival Angoulême 2016
Malgré la pluie, les fous de BD, 200.000 visiteurs cette année, se sont pressés en foule au 43e Festival du 9e Art, à Angoulême. Un marché encore florissant, même si les fans ont pris quelques rides.

Crachin et foule compacte ce samedi dans la rue piétonne Hergé, débaptisée ainsi en l’honneur du Festival de la BD d’Angoulême. Public de quinquas, familles, ados, tous les fans, patientent, disciplinés, en une queue interminable pour pénétrer dans le saint des saints, le hall du « Monde des bulles », après deux heures d’attente!

Au programme l’expo Lucky Luke, rencontres, dédicaces, spectacles…

« On vient chaque année depuis vingt ans », me confie Christian, passionné à barbe blanche, arrivé avec sa femme et sa fille, après trois heures de route pour se frotter à ses héros d’antan. « C’est moi qui leur ai passé le virus, avoue t-il. Je reviens toujours aux classiques, Thorgal, Blake et Mortimer, Bob Morane, Aldebaran… Mais ma fille, qui aime aussi les mangas -moins chers et plus dynamiques, précise l’intéressée du haut de ses 20 ans-  cherche à m’influencer. »

A l’intérieur, le public déambule entre les stands et les piles d’albums, s’agglutine aux séances de dédicaces, parfois munis d’un pliant ou avachis par terre.

Ici, il y a même un tirage au sort organisé par l’éditeur d’Alex Alice (« Le château des étoiles« ), et les places sont chères: 7 gagnants sur 70 postulants pour avoir l’honneur d’approcher le maître et de repartir avec une esquisse.

« Je viens depuis vingt-cinq ans, dit un autre papa débarqué avec femme et neveux. Bien sûr, on est content de retrouver nos héros de jeunesse, mais il y en a

quand même pour tous les âges: les nouveaux venus comme Astrid Bromure, les Titeuf, ou les BD Kids comme Anatole Latuile… Habituellement, je conseille les albums à mon fils de onze ans, continue t-il. Mais, pour une fois, c’est lui qui m’a indiqué « Ninn«  (Kennes édition) « .

Ce quinqua à lunettes s’est tout de même laissé séduire par le trio décapant des « Vieux fourneaux »(Dargaud) à la gloire de trois septuagénaires en goguette... »C’est drôle et décalé, il fallait oser faire un album sur des grabataires! »

Un vent de jeunesse éternelle

Poursuivant mon slalom entre stands bondés, je tombe sur un dessinateur plus abordable, qui oeuvre face à quelques fans. Dur, dur, le marathon? « Ça dépend de l’heure à laquelle on s’est couché, mais il vaut mieux être frais et dispo pour l’exercice », me confie Romuald Reutimann (Tim et Léon, Les enfants de Midvalley). Heureusement, les lecteurs nous laissent une certaine liberté dans les dédicaces« , remarque cet artiste. Résidant à Cherbourg, il s’estime heureux de vivre de son talent, comme trois mille autres de ses congénères. Et pour lui, l’âge d’or de la BD perdure, avec un retour des séries classiques et des nouveaux auteurs. »Vous vous rendez compte, lâche-il, enthousiaste. La BD, c’est super. Ca permet avec ça (il brandit son crayon!) d’avoir le budget de Stars Wars. » Sympa !

L’amateur de BD porte cheveux gris et binocle

Plus loin, je fais un dernier détour au stand des Editions Delcourt. Si l’on observe les fans à cheveux blancs alentour, ne peut-on craindre que le public peine à se renouveler ? «  Oui, notre public vieillit, reconnaît volontiers Grégoire Séguin. Mais les personnages, eux, ne vieillissent pas. On les réexploite en les rajeunissant.. » Pourtant, cet éditeur ( deux prix au Palmarès 2016 avec Prix spécial du jury pour « Carnet de santé foireuse », et le Prix spécial jeunesse avec « Le grand méchant renard » ) précise que les héros « vieux » comme ceux de l’album « Les vieux fourneaux « , trois superseniors, ont ouvert une brèche. « Nous traitons souvent des sujets de société. Et même si on ne les provoque pas, on les accompagne…Ainsi, nous avons ré-édité l’ouvrage de l’espagnol Paco Roca, « Rides« , devenu « La tête en l’air » sur un malade d’Alzheimer, un livre qui avait beaucoup touché. Aujourd’hui, nous préparons avec le scénariste Xavier Betaucourt un album qui se déroulera dans un service de soins palliatifs. Pour mener à bien ce projet, nos auteurs vont aller dans un centre á Roubaix. Ce livre intitulé « Quelques jours à vivre », emprunt d’humanité, sortira au printemps 2017 » …

Libre à vous ensuite de préférer les vieux héros relookés comme Lucky Luke, bientôt repris par Jul (« Sex and the city » sur Arte) et Achdé (Dargaud, sortie en novembre 2016), ou une nouvelle et punchie « Vieille dame indigne », surgie du trait génial d’un dessinateur atypique.

Le palmarès 2016

FAUVE D’OR : Ici – Richard McGuire – Gallimard

FAUVE SPÉCIAL : Carnet de santé foireuse – Pozla – Delcourt

FAUVE DE LA SÉRIE : Ms. Marvel – Wilson, Alphona – Panini

FAUVE DU PUBLIC – Cultura : Cher pays de mon enfance – Collombat, Davodeau – Futuropolis

FAUVE JEUNESSE : Le grand méchant renard – Benjamin Renner – Delcourt

FAUVE POLAR – SNCF : Tungstène – Marcello Quintanilha – Cà et là

FAUVE – PRIX REVELATION : Une étoile tranquille – Pietro Scarnera – Rackham

PRIX DU PATRIMOINE : Père et fils, Warum

PRIX DE LA BANDE DESSINÉE ALTERNATIVE : « Laurence 666 », éd. Mauvaise Foi

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